Hommage à Marc Pietri – Jean-Pierre Versini-Campinchi.
« A Marc Pietri
Tu nous l’as joué jusqu’au bout.
Tu nous l’as joué à l’envers.
Versini tais-toi, laisse causer les autres.
J’édulcore, vous avez bien compris : Versini, ta gueu-leu.
Pas cette fois ci, je me tais.
Il n’y a pas de convenance, ni de convention.
Il n’y a que des amis et des orphelins, tes amis et tes orphelins, famille de sang, familles d’amour des deux sexes, de tous âges, de celui de ta petite fille à celui de la maman de Rozenn qui vit toujours.
Si j’avais du talent, je te la raconterais San Antonio et Bérurier, tes Missel, tes bréviaires mais c’est de Mauriac – que ne t’as jamais lu – que me vient la formule définitive : « Jusqu’à vingt ans, on se fait des amis, après, on se fait des relations ».
Et bien toi, tu as passé ta vie à faire de tes relations des amis.
Se faire des amis tu nous as appris combien cela demande d’attention, de temps, de prévenance, ça se cultive, ça s’entretient, ça se protège, de la boite de sardines retour de Quiberon au muguet du 1er mai aux dames.
Tiens ! Le club de Quenza, complètement improbable, des membres de la diaspora corse, certains connus dans leur village, d’autres dans le monde entier, des corses de l’Ile, normal, mais un avocat lyonnais important et catholique pratiquant, mais aussi une notabilité du monde des affaires marocain et musulman et le grand rabbin de France, qu’allait-il faire là ! Tu l’avais capturé pour tenter de faire de la Corse un territoire des Justes parmi les Nations. Notre grand rabbin savait que c’était probablement chose impossible parce que pour les rescapés de la Shoah, seuls des humains peuvent être honorés Juste parmi les Nations.
Mais il est resté au club !
« J’interdis que quiconque prenne la parole après moi à ton enterrement » avais-tu dit. Les vieux d’entre nous étaient donc peinards et les jeunes allaient tranquillement attendre que tu te diriges centenaire, petit Alzheimer, petit cancer tranquille, qui allaient laisser le temps au temps.
Mais tu as triché.
Trop la tentation de voir si c’est vrai qu’on t’aime.
T’as pas pu résister à la tentation de voir s’ils sont tous là.
Ils sont tous là.
Mais pour cela, il fallait que tu partes le premier.
Le preums !
Salut Pietri.»
Maître Jean-Pierre Versini